vendredi 14 septembre 2018

Urbs....La Ville Eternelle - Impressions de voyage - Deuxième jour


Urbs ... La Ville Eternelle




C’est mon deuxième jour à Rome.

Alors qu’hier soir il faisait très chaud, ce matin, la température est plus clémente. En effet, l’orage a tonné et déversé des trombes d’eau toute la nuit. Mais cela ne m’a pas empêchée de dormir car, en voyage, j’emporte toujours des boules Quies pour pouvoir faire face à toute éventualité. Je suis donc reposée et même, en pleine forme. Des grandes fenêtres de ma chambre, je vois de la verdure et des fleurs. Je m’approche, mais il est hors de question de se donner de l’air car elles semblent s’ouvrir vers l’extérieur, et sont "barreautées" comme prison !  Tant pis. J’enfile une robe et monte à la cuisine dans l’espoir  d’y boire mon thé du matin.

Mais l’affaire n’est pas simple ! J’avais oublié qu’en Italie, les gens ne boivent que du café très fort. Dans l’étrange cuisine, il n’y a pas de bouilloire, pas de théière, et naturellement, pas de thé ! Mais je rencontre Thomas, un jeune homme français. Nous nous saluons.  Il se prépare une boisson indéfinissable. Je fais chauffer de l’eau dans une gamelle destinée à cuire des légumes ou des pâtes, et mets dedans des infusions de camomille périmées. Et, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, nous nous asseyons face à face à la minuscule table branlante, et commençons à échanger nos impression sur notre logement. Nous sommes tout à fait d’accord : cette maison est affreusement étrange, et étrangement affreuse. Mais qu’importe ! Les tarifs sont imbattables, et nous n’y finirons pas nos existences. Puis, nous nous présentons. Thomas vient de Lyon. Il est Chef de rayon dans un supermarché et passe toutes ses vacances à étudier la langue et la civilisation italienne, résidant tantôt dans une ville, tantôt dans une autre. Je trouve cela admirable et le lui dis. Il sourit modestement. Pour ma part, je fais du tourisme. D’ailleurs, je ne m’attarde pas parce qu’aujourd’hui, je compte aller visiter le Vatican …

Mais j’arrive beaucoup trop tard ! C’est que je mets une heure entre mon étrange gîte et Saint Pierre. D’accord, je ne marche pas vite, mais c’est tout de même loin. Je prends donc tous les renseignements possibles, les rendez-vous pour les visites des Musées du Vatican et de la Chapelle Sixtine, et ce sera pour demain.  Rassérénée, je dirige mes pas vers le Château Saint Ange.



                                                             Les bords du Tibre

Les bords du Tibre sont très jolis. Par endroits il y a des platanes dont les branches pendent vers l’eau et sous lesquels les amoureux se prennent en photo. La célèbre rivière ne me semble pas bien large … Evidemment, comparée au Mékong, ou mieux encore, à l’estuaire du Fleuve Bleu au nord de Shanghaï … Je sais. Je ne devrais pas comparer. Mais c’est humain. En arrivant en Asie, je pensais souvent à l’Europe. Et maintenant que je réside en Europe de façon permanente, je compare ce que je vois à ce que j’ai connu et vécu en Asie.

Que voici un beau pont ! Il fait face au Castel Sant’Angelo – forteresse qui me semble tenir beaucoup plus de la prison que du château. Il mériterait de s’appeler « Le Pont des Anges » car, des deux côtés, il est bordé de gracieuses statues de créatures angéliques, telles que nous, les hommes, nous nous les représentons. Et que font les anges au ciel ? Voyons ! Il est bien connu que, de tous les arts pratiqués sur cette terre, le seul qui ait droit de cité dans l’au-delà, c’est la musique ! Aussi ne suis-je pas trop surprise d’entendre jouer de la musique classique. Une mélodie très familière … Bien sûr ! C’est « La Petite Musique de Nuit » de Mozart. Un violoniste de rue se tient non loin du Castel Sant’Angelo, et je suis si contente que je décide de m’installer sur le rebord du mur qui borde la berge, comme le font de nombreux touristes. Je m’assois par terre – comme au bon vieux temps, lorsque étudiante, je visitais Londres – et sors mon pique-nique : pain allemand  et raisins italiens. Je grignote tout doucement en regardant tout le monde : le musicien – qui enchaîne les airs classiques ou plus variés – les jeunes gens et jeunes filles qui, comme moi, mangent des sandwiches assis à mes côtés, les gens consciencieux qui se hâtent vers l’entrée du Castel en regardant leur montre – sûrement parce qu’ils veulent visiter un maximum de monuments en un minimum de temps….
J’adore regarder les gens passer ! Je joue à deviner leurs nationalités, leurs âges, leurs motivations…..




C’est en 125 que l’Empereur Hadrien fit construire ce qui devait lui servir de mausolée. Mais très vite, cela devint un bâtiment à vocation militaire défensive. Lors de la grande peste de 590, le Pape Grégoire 1° vit un ange apparaître au sommet de l’édifice. C’est à partir de ce moment qu’il fut appelé « Château Saint Ange ». Il servit de prison, de refuge pour les papes, les empereurs ou les rois lors de graves émeutes. C’est que les romains, à l’instar des parisiens, avaient la révolution facile ! De nos jours, c’est un musé

Comme je finis mes derniers grains de raisin, je vois le musicien ranger son violon. C’est un homme jeune, qui porte une chemise noire flottant sur un jean gris et des baskets noires à semelles blanches. Il met sa boite à violon sous son bras et s’en va…. déjeuner, probablement. Le charme est rompu. Je me lève et vais visiter la ronde forteresse. C’est difficile à décrire. Toutes proportions gardées, cela me semble comparable au bâtiment circulaire de l’Aéroport de Roissy I. A l’intérieur il y a des pentes pour accéder aux différents niveaux, rappelant les tapis roulants qui occupent le centre de l’aéroport.  Sur certaines terrasses extérieures, on peut encore admirer d’antiques engins guerriers comme des pièces d’artillerie en bronze et quelques boulets de petite taille. Ca ne devait pas faire de grands dégâts. Nous montons vers la terrasse supérieure, celle que domine la statue gigantesque du Saint Ange.

Une fois arrivé là, le groupe de touristes auquel je me suis jointe, prend ses aises. Chacun fait autant de photos qu’il le peut et tout le monde admire la vue exceptionnelle de la ville qui s’offre à notre admiration. Le soleil brille, mais étant en hauteur, un vent léger nous rafraîchit. C’est l’avantage d’être près du ciel !

Je suis en vacances. Personne au monde ne sais où je suis ni ce que je fais. Personne ne m’attend nulle part. J’ai donc tout mon temps ! Je regarde la Ville Eternelle et je jouis de la délicieuse brise qui fait flotter ma robe de soie vietnamienne …. beaucoup plus gracieusement à mon avis, que les vêtements de métal du seigneur des lieux : l’Archange Michel.




Après cette délicieuse halte, nous reprenons la visite. Cette fois : les appartements du pape Paul III …. si je me souviens bien. Au détour d’un couloir, je me retourne et contemple le buste ce de souverain pontife. Voici la photo que j’ai prise. Mais si ce n’est pas lui, qu’il veuille me le pardonner ! 

Alexandre Farnèse (1468 – 1549). Il régna pendant quinze années sous le nom de Paul III. Il fonda la Compagnie de Jésus, convoqua le Concile de Trente, réorganisa l’Inquisition, et condamna officiellement l’esclavage des indiens d’Amérique du sud. Issu d’une grande et puissante famille, il avait reçu la meilleure éducation que l’on pouvait avoir à son époque, et il était doté d’une brillante intelligence. Avant de devenir prêtre, il avait eu quatre enfants avec Sylvia Ruffini. Pierre-Louis Farnèse, Duc de Parme ; puis deux autres fils, Paolo et Ranuncio ; et une fille, Constanza.
Il existe de nombreux tableaux le représentant, et quelques bustes. Ceux-ci – à mon avis – témoignent mieux de sa forte personnalité.

Nous traversons de grandes et larges pièces aux murs entièrement peints de sujets mythologiques bien en chair, toujours nus, et toujours occupés à ce que je nommerai pudiquement « des prémisses amoureuses ». J’ai le mauvais goût de trouver que cela ne porte pas au recueillement ni à la prière. Il y a également de simples motifs décoratifs très gracieux. Dans une petite salle, nous pouvons contempler d’assez effrayants coffres de bois recouverts d’un métal très résistant, pourvus de pentures et d’impressionnantes serrures. C’est la chambre forte du pape. L’équivalent d’un coffre Fichet-Bauche pour l’époque ! Certains touristes murmurent des commentaires sardoniques. D’autres ne se privent pas de rire ! Mais tout le monde s’extasie.

La visite est terminée. Je continue ma promenade. Traverse le Tibre en saluant les anges qui montent la garde pour l’éternité sur leur pont personnel, face au château de leur généralissime ! Cet endroit me plait beaucoup. Mais l’après- midi est loin d’être terminée et je regagne une petite rue perpendiculaire à la Via Della Conciliazione, cette large voie qui mène à l’Eglise Saint Pierre, parce que j’y ai repéré ce matin un arrêt des bus touristiques. Ils sont tout bariolés en couleurs vives. J’adore ça ! Je grimpe sur l’impériale et m’installe près du bord. Lorsque nous croisons un autre bus semblable, je pourrais presque serrer la main des autres passagers tellement nous sommes proches. Ces merveilleux bus suivent le meilleur circuit possible afin que les touristes puissent avoir une vue sur tous les monuments. Comme nous sommes en hauteur, nous voyons bien mieux, et différemment, que lorsque nous marchons à pied. Et surtout, c’est beaucoup moins épuisant ! Car, je le dis souvent, pour moi, le métier le plus fatigant du monde, c’est… touriste !



« HOP ON, HOP OFF » telle est la désignation de ces merveilleux bus !

Ainsi donc, je fais un grand tour de la ville de Rome, passant par les plus beaux quartiers, admirant les monuments antiques ou les bâtiments plus récents, profitant de la situation en hauteur pour prendre de belles photos, bénéficiant du commentaire … en quelle langue ? Je ne sais plus. Une langue que je comprends. Et là, je me sens merveilleusement bien. J’ai l’impression de flotter dans un rêve. Oui. Je suis à Rome. La Ville. L’Age d’or. La République. Jules César. Auguste. Tous les Empereurs se présentent à ma mémoire, déjà fort encombrée … Ils ne font que passer comme des ombres. Puis voilà le Vandale Genséric, la déposition de Romulus Augustule, Théodoric roi des Ostrogoths …. Quelle tête pouvait-il bien avoir ? Je n’ai pas le temps de m’en soucier. C’est déjà le Moyen Age. La très célèbre « Lutte du Pape et de l’Empereur » ….

Là, je vois flamboyer la grosse barbe rousse de Frédéric I° de Hohenstaufen. Je ne sais plus combien de fois il est allé en Italie – en personne ou représenté par son armée – jusqu’à ce qu’il se réconcilie avec le Pape Alexandre et parte pour la Troisième Croisade. Lui. Et tous les autres. La Ville exerçait-elle une si puissante fascination sur ces hommes ?
Je crois qu’il s’agissait de bien autre chose….
Ah ! Nous voilà devant le Colisée ! C’est très impressionnant. Je suis sans voix. Impossible de commenter. Je prends quelques belles photos du haut de l’impériale, histoire de me conformer à ma situation de touriste, mais, je reviendrai, et j’en ferai bien davantage !  Puis, je regarde  avec avidité ces lieux si célèbres où tant d’êtres humains ont vécu, souffert ou été heureux. Amoureux, peut-être ?
Et maintenant, la boucle est bouclée et nous descendons de notre bus bariolé. Il nous a déposés non loin du Vatican.

En fin d’après-midi, la lumière change. Elle s’adoucit et quelques petits nuages projettent des ombres charmantes sur les eaux de la rivière. C’est l’heure à laquelle on ferme les guichets d’entrée des monuments. On ne vend plus de billets et les touristes, fatigués, ne pensent plus qu’à une chose : s’asseoir dans un endroit accueillant et sympathique pour y boire quelque chose de frais ! C’est ce que je ferais si je n’avais pas à marcher si longtemps pour regagner mes pénates. Mais, courageusement, je prends la ruelle très abrupte qui monte vers le petit bois où je retrouve la Piazzale Garibaldi. La statue équestre m’est maintenant familière. Elle me fait penser à celle d’Amir Temour – que nous appelons Tamerlan – à Tachkent. J’avais tellement aimé l’Ouzbékistan !
Reconnaître quelques rues, c’est déjà se sentir moins étranger.

Demain, je compte passer toute la journée au Vatican.


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