"Professeur
à Taïwan"
Voilà déjà trois
années que j'ai quitté l'Asie pour revenir en France. Je serais volontiers,
très volontiers, restée bien plus longtemps en Chine parce que non seulement
j'y exerçais le plus beau métier du monde : professeur, mais je me sentais
là-bas comme un poisson dans l'eau. Et puis, après de longs séjours dans
différentes régions soit à la périphérie de l'Empire du Milieu, soit en Chine
elle même, j'étais enfin revenue dans le sud. Et je crois pouvoir dire que si
je m'y plaisais tout spécialement, j'avais une raison bien particulière : j'y
avais commencé ma carrière. C'est là que j'étais arrivée, en Asie pour la toute
première fois de ma vie, pour occuper un poste d'assistante au Département de
Français de l'Université de Tamkang à Taïwan-la-Belle-Ile, laquelle est
traversée par le tropique du Cancer.
J'y avais découvert
la Chine, la civilisation chinoise, le système universitaire, l'histoire et les
traditions - et en plus, les rizières, les pluies tropicales et l'utilisation
des baguettes ! Or, déjà à cette époque - ce devait être l'écrivain qui
sommeillait en moi ! - je prenais des notes, des photos et me documentais sur
toutes sortes de choses.
Des années après,
c'est à dire tout récemment, obligée de quitter l'Asie, je me retrouve à la
tête d'une collection de cahiers, lettres, albums, etc. et je me mets à écrire,
à raconter ma vie, car elle a été peu ordinaire. Mon troisième ouvrage ne va
pas tarder à paraître, mais "Professeur à Taïwan" est le premier
récit dans la chronologie.
Voulez-vous que je
vous présente un petit passage ?
Mardi 29 Août 1978
De l’Hôtel Hyatt Rama
à Bangkok
« Chers tous,
Vous voyez que je ne tarde pas à donner de mes
nouvelles ! Je vais on ne peut mieux, confortablement installée dans un
des palaces de Bangkok, grâce aux bons soins d’un des membres du personnel de
la compagnie Alia qui, décidément, est de très loin supérieure à Egyp
Air !
Le voyage a été bon mais fatigant par sa durée. Nous avions
déjà une heure de retard au départ d’Orly, donc également du retard pour
atterrir à Amman, capitale de la Jordanie. Le soir on ne voit pas grand-chose,
mais je suis allée m’asseoir sur le rebord bien large d’une fenêtre en ogive,
qui n’était pas vitrée et donnait directement sur le désert. Une lueur bleuâtre
éclairait ce désert qui m’a semblé à la fois mystérieux et attirant, et la
douceur de l’air était un vrai délice après la climatisation de l’avion. Nouvel
arrêt à Bahreïn sur le Golfe Persique, en pleine nuit cette fois. Comme ces noms
font rêver… Après quelques heures de sommeil, on nous a réveillés pour prendre
le petit déjeuner juste avant l’atterrissage. Je n’ai certes pas dormi
longtemps, mais sûrement très bien parce qu’un des stewards m’avait baissé mon
siège et enveloppée dans une couverture sans même que je m’en rende
compte !
Bangkok me semble immense, très colorée et parfumée. Il y
règne une chaleur humide que je qualifierais d’enveloppante. Je ne sais pas
trop pourquoi, mais c’est le mot qui me vient. J’ai visité tout ce que j’ai pu,
à pied, en voiture ou en cyclo-taxi, ce qui est très amusant. On s’assoit sur
un petit banc en plastique de couleur vive monté sur deux roues et protégé des
intempéries par une sorte de dais coloré agrémenté de fanfreluches. Devant, le
chauffeur fait pétarader sa mobylette qui tracte l’engin. Naturellement, on
respire le gaz d’échappement à pleins poumons, mais c’est tellement bien !
Il fait 35-37° et le ciel est couvert, mais il ne pleut pas.
Cela pourrait être étouffant, mais comme il y a du vent, c’est finalement très
agréable. Par contre, je n’aime pas les endroits climatisés. Il y fait trop froid.
Hier soir, je suis ressortie pour aller dîner dans un autre
quartier de la ville. Moins touristique peut-être, car dans les rues flottait
une odeur de poisson séché, de friture et de…. cloaque. D’ailleurs la rivière
Chao Phraya est perpétuellement encombrée de barques et de toutes sortes de
détritus plus ou moins flottants et en décomposition, qui exhalent des odeurs
méphitiques. Mais cela ne me gêne pas du tout. Curieusement, je me sens
tellement à l’aise ici que rien ne m’étonne ni ne me dérange. J’ai même en
permanence l’impression d’être « revenue chez moi »…
Le lecteur le comprend : il s'agit d'une sorte de roman épistolaire. L'auteur des lettres s'appelle Annie. Elle écrit à sa famille au fur et à mesure qu'elle découvre l'Ile, les gens, les coutumes et fait partager tous les évènements de sa vie. Amélie de la Musardière, qui a retrouvé toutes ces lettres, les présente au lecteur et ajoute ses commentaires de temps à autre.
Si cela vous agrée, je posterai d'autres extraits de temps à autre !
Bonne soirée.
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